Mais sa proposition de former « un gouvernement d’ouverture » n’a pas connu le succès escompté car les ténors de l’opposition sont toujours sur la touche. Il doit donc redoubler d’efforts, faire appel aux amis du Gabon et recourir aux mécanismes éprouvés des traditions séculaires de son pays ,pour convaincre ses opposants. Le Gabon est à la croisée des chemins au sortir d’une élection présidentielle très disputée qui a failli faire basculer le pays dans la violence. Le pire a été évité grâce à une mobilisation efficace des forces de sécurité et aussi une prise de conscience salutaire des opposants. Ainsi la confrontation qui a fait couler beaucoup de sang à l’annonce des résultats provisoires ne s’est pas reproduite le jour de la proclamation des résultats définitifs consacrant la victoire de Ali Bongo.
Pourtant de nombreux médias français qui ont joué un rôle néfaste dans la couverture partiale de cette élection ont tout fait pour que le pays s’embrase. En pure perte ! C’est aussi une leçon majeure à retenir : l’influence des médias occidentaux n’est plus décisive, les Africains les ont démystifiés. Orchestrer
une campagne médiatique depuis Paris n’est pas nécessairement payante autrement un changement de régime se serait produit au Gabon.
Mais Ali Bongo a su résister et le peuple gabonais, dans sa majorité, avec lui. Qu’il soit le vainqueur ne fait aucun doute.
Que la victoire soit faible voire étriquée est aussi une réalité incontestable. Reste alors la question léniniste : que faire ?
La réponse est évidente : dialoguer pour trouver un terrain d’entente. C’est ce que fait le président réélu qui a tendu
la main à tous ses adversaires. Avec peu de succès jusqu’ici mais avec le temps les uns et les autres vont finir par entendre la voix de la raison, celle de la patrie et du bon sens.
Si la violence a été vite stoppée ce n’est certainement pas pour l’irriguer ensuite. Il y a bel et bien une fenêtre de tir…pour le dialogue. Mais les Gabonais ont besoin de l’aide
de leurs amis sincères soucieux d’abord et avant tout de préserver l’unité du pays, sa cohésion sociale et sa quiétude.
Une amélioration de la situation économique pourrait aussi favoriser une évolution pacifique. L’entrée en scène des autorités traditionnelles (chefs coutumiers, sages, etc.) est
une piste à explorer. Tout levier pouvant aider à consolider le dialogue et la paix doit être actionné.
Les réalités locales sont un patrimoine qui peut nourrir la démocratie dont la finalité ultime est la pacification de la lutte pour le pouvoir.
En vérité c’est Jean Ping qu’il urge de ramener sur le chemin de la concertation et de la lucidité. L’histoire ne marche pas à reculons. Le réalisme impose de répondre à l’appel
au dialogue de Ali Bongo pour faire faire à la démocratie gabonaise un pas de géant. La limitation des mandats, l’organisation des scrutins à deux tours ou non, la publication
de l’ensemble des bureaux de vote sur internet, l’identification du corps électoral en tenant compte de l’évolution démographique, etc. tout pourrait être sur la table.
C’est une telle option à moyen terme qui avait abouti au code électoral consensuel sénégalais et moins d’une décennie plus
tard à l’alternance de l’an 2000. Le président Abdoulaye Wade a fini par accéder au pouvoir après 26 ans d’opposition. Jean Ping à 73 ans est pressé par le temps. Pourtant les présidents Mugabé du Zimbabwe, Essebsi de Tunisie ou encore Biya du Cameroun sont plus qu’octogénaires et
solides au poste. Tant qu’il n’y a pas de limitation d’âge ; l’espoir est permis. Et tout vaut mieux que de jouer les Néron. Incendier son propre pays, faire couler le sang de ses
compatriotes est un choix absurde. Cela écarté, s’ouvre la seule voie qui s’impose à un leader authentique celle de la concertation et du dialogue. La situation actuelle du Gabon est aussi uns chance pour mettre le pays définitivement
sur les rails de la démocratie. Avec des discussions approfondies guidées par la volonté de faire triompher la paix ce qui exige de dépasser les postures dogmatiques. Se réfugier dans les incantations et les diatribes c’est tourner le dos à l’éthique de responsabilité. Un homme d’Etat est quelqu’un
capable de dépassement, prêt à sacrifier son égo voire son ambition personnelle pour défendre l’intérêt supérieur de sa patrie. La paix civile et la réconciliation des gabonais
vaut tous les sacrifices. Ali Bongo l’a bien compris et agit en conséquence. Jean Ping a le choix : saisir la main tendue ou la fuite en avant.