« Nous avons l’ambition d’ouvrir Sandiara au monde »

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Elu maire de la commune de SANDIARA située dans le département de Mbour depuis 2014, le Docteur Serigne Guèye Diop, agronome de formation et chercheur, premier noir à diriger la multinationale suisse NESTLE Recherche Africa est en train de transformer de manière spectaculaire sa localité. S’appuyant sur les possibilités offertes par l’Acte 3 de la décentralisation aux maires, il a lancé de nombreux projets de développement dans les domaines de l’éducation et de la formation professionnelle, de l’industrie en général et agroalimentaire en particulier, du logement social, de l’encadrement des femmes, etc. Nous avons rencontré M. Serigne Guèye Diop pour en savoir un peu plus. Entretien :

Le Défi Panafricain : L’Acte III de la décentralisation a suscité beaucoup d’espoir et de critiques. Quelle est votre appréciation de sa philosophie générale ?

Serigne Guèye Diop :L’acte III de la décentralisation est un moment fort des réformes initiées parle Président Macky SALL. Il s’agit d’une démarche novatrice pour impulser unegestion plus efficiente des terroirs et des territoires dans l’ensemble duSénégal. Nous avons constaté que la centralisation a conduit à un échec. Depuis1972 des réformes ont été initiées les unes après les autres jusqu’à l’ActeIII. Celui-ci affirme l’égale dignité de toutes les communes sénégalaises. Lescitoyens du Sénégal des profondeurs ont le droit de conduire leur propre actionde développement pour changer leur destin en choisissant euxmêmes les projetsqui leur semblent prioritaires dans le sillage de la politique générale del’Etat. L’acte III décrète la communalisation intégrale avec 557 communesd’égale dignité sur toute l’étendue du territoire national. Que peut-on luireprocher ? Le fait que des mesures financières nécessaires pour l’accompagnementdes communes n’aient pas été prises. Il fallait donc d’imaginer des projets etc’est ce que nous avons fait dans le cadre du « Plan Sandiara Emergent ». C’estdonc aux maires et aux collectivités locales d’imaginer des projets à soumettreau gouvernement, aux Ong et aux bailleurs de fonds pour pouvoir les financer etles réaliser. L’Acte III donne une nouvelle indépendance aux maires poursolliciter et obtenir des prêts au niveau des banques pour réaliser des projetsà même de booster l’émancipation économique et sociale des communes. C’est ceque nous faisons à Sandiara. L’Acte III est une aubaine qui nous a permisd’élaborer un plan sur dix ans « Plan Sandiara Emergent » en droiteligne du « Plan Sénégal Emergent ». Notre plan s’articule autour de 12 projetsstructurants tandis que celui de l’Etat englobe 27 projets. Premièrement nousavons décidé de restructurer l’économie pour la diversifier. Elle estessentiellement agricole à Sandiara et l’érection de trente (30) usines vagénérer des revenus industriels pour les habitants de la localité et del’ensemble du département. (Fenêtre) Ensuite, nous mettons l’accent sur laformation des hommes pour que la maitrise des sciences et des technologiesfavorise un développement global. L’objectif est d’atteindre 100 % de taux descolarisation de notre commune car seuls des citoyens éduqués et formés peuventprendre en charge leur propre développement. C’est pourquoi nous sommes entrain d’investir massivement dans la construction d’infrastructures scolaires.Un lycée et plusieurs collèges sont en chantier. Enfin, la bonne gouvernanceest pour nous un impératif car la transparence est une exigence pour unegestion saine et efficace. Le problème de la gestion opaque a beaucoup fait demal à l’Afrique tout comme l’accaparement des ressources naturelles etfinancières. A Sandiara, il est interdit aux personnels de la commune dedemander de l’argent ou d’en donner pour les activités politiques. Il n’y a pasde transparence sans rigueur. L’Acte III est une chance pour renforcerl’autonomie des communes et permettre à leurs habitants d’agir directement pourleur propre développement.

Elle est essentiellementagricole à Sandiara etl’érection de trente (30)usines va générer desrevenus industriels pourles habitants de lalocalité et de l’ensembledu département.

Votre projet : « Plan Sandiara Emergent » est en train d’être une illustration remarquable des possibilités offertes par l’acte III de la décentralisation. Pourquoi avez – vous lancé cette initiative si ambitieuse ?

 Quels sont les atouts de votre localité qui vous confortent dans votre action de développement ?

Le « Plan Sandiara Emergent » est inspiré du« Plan Sénégal Emergent » élaboré par le Président Macky Sall et quiconstitue la feuille de route pour propulser le Sénégal vers l’émergence en2035. Pour cela il faudra qu’augmentent les revenus des ménages dans tous lesdomaines. Nous avons organisé un projet similaire que nous avons appelé« Projet Sandiara Emergent ». Nous avons utilisé les méthodesscientifiques de diagnostic des réalités de notre commune au niveau économique,social, environnemental, etc. Les défis à relever sont la lutte contre lapauvreté, le chômage des jeunes, le manque de cadres, la fragilité del’environnement et l’exode rural. Fenêtre) Pour être efficace, nous allons nousattaquer aux causes : la pauvreté progresse parce qu’il n’y a pas desopportunités de création de richesses. L’agriculture qui est la principaleactivité est peu productive car les sols sont pauvres et les intrants (engrais)sont peu utilisés et il y a peu de production du fait du caractère saisonnierdes cultures. Il n’y a pas de jachère ce qui épuise les sols et aboutit à unfaible rendement par hectare. En conséquence l’exode rural se développe carlorsqu’un jeune n’a plus de revenus dans son terroir, il choisit l’exode. Notre« Pse » local avec 12 projets structurants s’appuie d’abord sur l’éducation etla formation professionnelle. Les jeunes vont ainsi bénéficier d’un savoir etd’un savoir-faire sur place. Le but de la construction du premier lycée deSandiara que j’avais initié était de combler ce gap. Aujourd’hui, 700 à 800étudiants sont sortis du Lycée construit en 2006. Le nouveau lycée technique enconstruction et dont la première pierre a été posée par le Président Macky Sallpermettra de lutter efficacement contre le chômage en offrant aux jeunes desformations professionnelles à treize (13) métiers : agriculture, élevage,industrie, électricité, bâtiment, tourisme, etc. Ces métiers correspondent à lademande du monde industriel et le lycée technique résout la question del’adéquation entre la formation et l’emploi. Les jeunes ont donc le choixd’avoir une formation qui débouche sur l’obtention d’une embauche. Notreobjectif à moyen terme est de donner la possibilité, à travers l’éducation etla formation, à chaque famille de compter dix cadres en son sein et qui dans undélai de 10 ans vont être au top dans leur profession. L’émergence c’est lesfamilles : des personnes pouvant vivre de leur propre activité. L’autrebut poursuivi par le « Pse » est de favoriser l’industrialisation.L’Europe a fait sa révolution industrielle au 19éme siècle et a conquis la premièreplace dans le monde alors. L’Afrique doit en faire de même. La zoneindustrielle de Sandiara a une superficie de 50 hectares ; c’est la zoneindustrielle communale la plus grande du Sénégal. Elle permettra de créer10.000 emplois divers. In fine, cela va favoriser l’augmentation du PIB local.Il faut préciser que la zone industrielle de Sandiara va abriter 30 usines(dont les premières sont presque terminées) aves des investissements d’unmontant de 60 milliards de FCfa. Elle va accueillir les élèves du lycée techniquequi vont faire de la formation par alternance. La zone va aussi fonctionnercomme un lieu d’attraction pour les entreprises qui vont venir s’installer àSandiara parce qu’il y a le lycée technique. C’est un système de vasescommunicants. L’autre avantage de la zone de Sandiara est à considérer dansl’innovation qu’elle met en exergue en matière de financement des collectivitéslocales. Et cela apporte une réponse pertinente aux critiques contre l’acte IIIde la décentralisation qui « transfert des compétences sans donner lesressources financières qui vont avec ». Aux maires de faire preuved’imagination pour trouver de l’argent et l’utiliser selon leurs besoins enaidant les étudiants de leur localité, les femmes, etc. Nous avons aussi leprojet de permettre une activité agricole toute l’année. Les paysans ont dutravail quatre mois sur douze (pendant l’hivernage) et cela doit changer. Pource faire il faut trouver des partenaires aux 30 villages de la commune pourfavoriser un travail en continu avec le maraîchage notamment qui est plusrentable. En effet un hectare de production maraîchère est dix fois plusrentable qu’un hectare de culture arachidière. L’idée est de mettre en place leprojet : « un village, un projet agricole » et cela va aussifaire baisser sérieusement le chômage des jeunes. L’électrification rurale estun autre projet fondamental pour le développement local et national. Nousambitionnons d’électrifier les 22 villages et les 8 hameaux de Sandiara pourfavoriser la conservation des produits agricoles et halieutiques,l’installation des tailleurs, par exemple et d’ouvriers dans les villages etles paysans grâce à des groupes électrogènes, etc. Les populations vont ainsiêtre fixées dans les terroirs et se doter en équipements modernes. Noter actionglobale inclut un plan d’occupation des sols sur une surface totale de 20.000hectares (Sandiara). Une redéfinition va séparer les zones d’habitation, cellescommerciales, agricoles, sylvo-pastorales, forestières, cimetières, etc. Celava nous éviter l’anarchie des centres ville et de sécuriser les sols pour lesfutures générations. Il y a aussi un projet qui me tient à cœur à savoirl’hôpital de médecine traditionnelle et de médecine moderne. J’y ai travailléen tant que chercheur. Il existe beaucoup de plantes médicinales en Afrique.Mon rêve est d’associer médecins et guérisseurs traditionnels pour des échangesde connaissances féconds. Avec un plateau technique évolué pour une réponseadaptée et pertinente à la demande de santé locale. Le « Plan SandiaraEmergent » cible tous les services modernes et à cet égard nous nousfélicitons que le professeur Souleymane Mboup ait choisi d’ériger ici un centrede recherche sur les soins de santé. Trois autres projets méritent d’être citésà savoir les pistes rurales qui sont un impératif pour désenclaver les villageset les relier aux marchés. Onze (11) kilomètres sont déjà en construction. Il ya aussi la construction de 200 logements sur 1000 que nous avons mis enchantier. Deux cent (200) seront bâtis à Sandiara et 800 dans toute la zone. Lebut est de moderniser l’habitat rural et de permettre aux jeunes de se loger enfaisant l’acquisition de logements avec des prêts sur 25 ans. Ils auront ainsiun travail sur place, une maison et des lieux d’éducation. Enfin il y a lefoirail que nous comptons ériger car Sandiara est un marché à bétail connu etqu’il faut moderniser. Une superficie de 10 hectares est prévue. Un forage seracreusé, des boutiques, des restaurants, des blocs sociaux, etc. seront construitsaussi. Un parc de vaccination sera disponible sur place et une gendarmerie etune poste vont aussi être aménagées. En ce qui concerne les femmes de la zone,elle bénéficie d’un projet avec un financement de 20 millions de FCfa.L’autonomisation des femmes est un impératif et elles doivent avoir desactivités économiques propres, sources de revenus et moyens d’émancipation.Nous avons d’ailleurs offert aux femmes une usine de production de farine demil et de pâte d’arachide. Nous aidons aussi nos étudiants pour qu’ils puissentse loger à Dakar et ailleurs. L’enveloppe de 4 millions FCfa va être portée à 5millions l’année prochaine. Last but not least le château d’eau de Sandiara estmaintenant terminé. Il a été offert par le Président de la République MackySall qui a dégagé une enveloppe de 500 millions de FCfa. La mairie a participépour les branchements sociaux à hauteur de 30 millions de FCfa. Si nous mettonstout cela en œuvre, dans 10 ans des résultats excellents nous permettront defaire reculer de manière réelle la pauvreté dans notre localité.

A Sandiara, il est interdit aux personnels de la commune de demander del’argent ou d’en donner pour les activités politiques. Il n’y a pas de transparencesans rigueur.

Le président Macky Sall est venu lui-même inaugurer le lycée de Sandiara que vous avez mis à la disposition de vos concitoyens et il a aussi posé la première pierre du lycée technique. C’est un geste fort qui indique un soutien conséquent à vos efforts. Quel est votre sentiment ?

Je dois d’abord féliciter le président Macky Sall qui m’a fait l’honneur, pour son premier déplacement en tant que nouveau chef de l’Etat, de venir inaugurer le Lycée de Sandiara. C’est un geste politique fort doublé d’une marque d’amitié que nous apprécions au plus haut point. Le Lycée de Sandiara que nous avions commencé à construire depuis 2002 est ma plus grande contribution au développement de mon pays. Avec ce Lycée les populations de Sandiara ont comblé un gap. Elles peuvent profiter d’une éducation de priorité de proximité et de qualité pour leurs enfants. J’ai beaucoup souffert du tutorat moi-même et j’ai vu beaucoup d’élèves abandonner leurs études à Kaolack et Mbour faute de pouvoir s’y loger décemment. J’avais pris l’engagement que lorsque j’en aurais les moyens j’apporterais une réponse pour éviter aux jeunes de Sandiara et des environs de subir les mêmes difficultés. L’objectif est d’assurer à tous l’école obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans. A partir de la troisième un choix peut-être fait pour continuer ou s’engager dans une formation professionnelle en menuiserie, plomberie, mécanique, etc. Il faut dire que cette zone était négligée par le pouvoir et il est heureux que le Président Macky Sall nous donne une place importante surtout dans le domaine de l’éducation qui est la clé du développement. Aujourd’hui nous avons des résultats satisfaisants de 2002 à 2012, 800 bacheliers. Et donc 800 étudiants au Sénégal et à l’étranger. Nous avons choisi de bâtir un Lycée d’excellence : cette année notre taux de réussite au Bac est de 60 % à Sandiara alors qu’il est de 36 % au niveau national. Le Lycée s’oriente vers les sciences et les technologies sans lesquelles nous ne pouvons pas avoir les cadres dont nous avons besoin. Nous poussons les élèves à choisir les filières scientifiques et notamment le Bac S. Après l’inauguration par le Président de la République le 27 novembre 2012 ; il a posé la première pierre du lycée technique professionnel de Sandiara qui compte 4 départements :

 • Agriculture

• BTP

 • Industriel

• Hôtellerie et Tourisme

Ce Lycée va pouvoir accueillir 1500 élèves. Il peut former jusqu’à 5000 élèves en formation par alternance. Les 13 métiers choisis pour être enseignés correspondent aux besoins de la zone industrielle de Sandiara et de la région de Thiès dans son ensemble. Il est le premier lycée au Sénégal du genre avec une superficie de 35 hectares avec 65 bâtiments et ateliers pratiquant la formation par alternance. C’est un lycée pilote. Et le président Macky Sall va en construire 7 dans différentes régions du Sénégal. (fenêtre) Le but ultime est de rendre efficiente la formation, de réduire significativement le taux de déperdition scolaire et de favoriser le développement national.

« Le Plan Sénégal Emergent » est le projet global de développement national du gouvernement de la république du Sénégal. Comment la communalisation de l’ensemble du Sénégal favorise t- elle ce choix politique ?

Elle va faciliter la territorialisation des politiques publiques parce qu’elle va être portée par les élus locaux. C’est le Conseil municipal qui va être en initiative. La communalisation intégrale permettra à l’autorité directe d’appliquer les politiques étatiques. Sa proximité avec les populations luis permet d’identifier les problèmes et les besoins et d’imaginer, avec elles, des solutions pertinentes locales. Ainsi les décisions se prennent au niveau local, en concertation avec les populations. Les autorités élues ont l’obligation de résultats pour être réélues. Les autorités administratives centrales sont nommées. L’exemple de la gouvernance locale aux EtatsUnis où les gouverneurs sont élus est riche d’enseignements. Toutefois nous avons besoins, par être à la hauteur, d’avoir des moyens conséquents. On devrait donner 10 % du budget national aux communes pour qu’elles investissent dans le social, l’économique, le culturel et le sportif. La communalisation induit un changement fondamental qui va impulser l’émergence. En vérité le Président Macky Sall veut développer le PSE à la base.

Vous appliquez à Sandiara les méthodes managériales qui vous ont si bien réussi dans votre carrière professionnelle dans le privé. Quelle évaluation en faites-vous depuis deux ans de gouvernance locale ?

 J’ai toujours penséque les méthodes de leadership et de management sont les mêmes en entreprise etdans les services publics : donner le meilleur de soi-même, choisir lesmeilleurs hommes, l’homme qu’il faut à la place qu’il faut à tous les niveaux.Le management des hommes c’est l’organisation également de l’administration dela commune. L’organisation est fondamentale ainsi que la reddition des comptes.Les hommes sont jugés à leurs résultats. Chaque projet a un managerresponsable. Mon rôle est d’entrainer, d’encourager, de coacher et desanctionner positivement ou négativement. C’est la même méthode que dans lesentreprises : Apprendre à se faire confiance pour relever ensemble lesdéfis. Notre objectif est aussi d’ouvrir Sandiara sur le monde. 200 Km2 c’esttrop étroit pour une action de développement économique. Il nous faut allerchercher des partenaires pour manager des politiques à long terme. Je suisaussi à l’aise dans une commune que des entreprises internationales. Ladifficulté c’est la lenteur dans les démarches administratives au niveau despréfectures et des ministères. Dans le privé les choses vont beaucoup plusvite. La difficulté c’est le niveau global. Dans le privé il est très élevé. Auniveau politique, il faut beaucoup de pédagogie. Mais c’est un challengenational.

Il est le premier lycée au Sénégal du genre avecune superficie de 35 hectares avec 65 bâtimentset ateliers pratiquant la formation paralternance. C’est un lycée pilote. Et le présidentMacky Sall va en construire 7 dans différentesrégions du Sénégal.

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