Mes chers compatriotes,
Demain, 4 avril 2020, nous célébrons le 60e anniversaire de
l’accession de notre pays à la souveraineté internationale.
A chacune et à chacun de vous, j’adresse mes chaleureuses
félicitations.
Je salue avec respect et affection nos anciens combattants. Vos
sacrifices immenses, chers anciens combattants, resteront à jamais
gravés dans nos cœurs et notre mémoire collective.
Puisse votre exemple inspirer notre jeunesse et semer en chaque
enfant de notre pays la graine du patriotisme qui nourrit le destin des
grandes Nations.
A vous, officiers, sous-officiers et militaires du rang, je renouvelle ma
confiance dans vos missions au service de la Nation et de la paix dans
le monde, souvent loin de vos familles. Ces missions ne sont pas sans
risque.
Je salue la mémoire de nos soldats tombés au champ d’honneur et
forme des vœux de prompt rétablissement pour les blessés.
Aux familles des défunts et aux blessés, je veux assurer que l’Etat
restera toujours à leurs côtés.
Mes chers compatriotes,
Cette année, nous célébrons soixante ans de liberté retrouvée et de
fraternité constamment revitalisée.
Nous devons ce parcours paisible et convivial à notre commun
vouloir de vie commune, à l’abri des turbulences qui déchirent les
peuples et froissent leur destin.
Ce legs des anciens nous engage à tenir ferme le flambeau de la
liberté, de la paix et de l’unité nationale, afin qu’il continue
d’illuminer notre voie et celle des générations futures.
Un grand défilé civil et militaire devait marquer l’éclat de nos 60 ans
d’indépendance.
Mais les circonstances exceptionnelles liées à la sévère pandémie du
COVID-19 ne permettent pas un tel évènement.
En lieu et place du défilé, je présiderai demain, au Palais de la
République, une cérémonie de levée des couleurs, sobre et
symbolique.
Toutes les autres manifestations initialement prévues sont annulées
sur l’étendue du territoire national.
Dans le contexte de lutte contre le COVID-19, le thème de la fête de
l’indépendance porte cette année sur « Le rôle des Forces de défense
et de sécurité dans la gestion des pandémies et autres catastrophes
». Voilà qui rappelle que nos Forces de défense et de sécurité, fidèles
au concept Armée-Nation, font corps et âme avec la Nation, et en
ressentent chaque pulsation.
Ainsi, au-delà des opérations liées à l’état d’urgence, l’Armée
soutient également notre vaillant personnel de santé, dont je salue, à
nouveau, la disponibilité, le dévouement, le courage, la compétence
et surtout le professionnalisme.
Cette pandémie COVID-19, inédite par sa brutalité, son ampleur et
ses effets paralysants, renseigne à suffisance sur les nouvelles
menaces qui pèsent sur l’Etat-Nation.
Nos Forces de défense et de sécurité doivent donc s’adapter
davantage à la prise en charge de ces périls, au double plan
stratégique et opérationnel.
Je poursuivrai le renforcement des capacités de nos Armées à cette
fin.
Face à cette pandémie sans précédent que nous vivons, je suis
rassuré que toutes nos forces, toutes nos intelligences sont unies
dans le même élan de lutte.
Les consultations élargies que j’ai tenues la semaine dernière
montrent que les ressorts de notre Nation restent solides.
Ne baissons pas la garde.
Restons mobilisés dans l’observance des règles d’hygiène
individuelle et collective. Respectons les mesures édictées par
l’état d’urgence.
Limitons nos déplacements.
Restons à la maison.
Prenons, très au sérieux, cette maladie
Evitons la stigmatisation, pour une maladie certes très contagieuse,
mais pas du tout honteuse.
Signalons aux services de santé tout cas suspect, pour une prise en
charge précoce.
C’est en observant ces règles que nous éviterons une propagation
générale du virus que nos structures de santé ne pourront pas
contenir.
Mes chers compatriotes,
Comme partout ailleurs, notre économie subit de plein fouet l’impact
du COVID-19.
Des secteurs comme le tourisme, l’hôtellerie, la restauration, les
transports, le commerce, la culture, les bâtiments et travaux publics,
entre autres, sont durement affectés.
Notre croissance économique soutenue sur plusieurs années est
brutalement freinée et passera de 6,8% à moins de 3%.
Mais ce soir, mes pensées vont particulièrement à toutes celles et à
tous ceux qui souffrent de l’impact de la crise du COVID-19.
Je pense aux millions de pères, mères et soutiens de familles
menacés de précarité.
Je pense à notre diaspora, si généreuse envers la Nation et
aujourd’hui éprouvée.
Je pense aux nombreuses entreprises et à leurs salariés, tous victimes
de cette crise imprévue. Je veux dire à tous et à toutes que l’Etat ne
vous abandonnera pas.
Devant l’urgence, et en attendant une évaluation complète des effets
de la crise sur l’économie nationale, j’ai mis en place un Programme
de résilience économique et sociale, afin de renforcer notre système
de santé et soutenir nos ménages, notre diaspora, nos entreprises et
leurs salariés.
Ce programme est décliné en quatre axes.
Premièrement, le soutien au secteur de la santé à hauteur de 64,4
milliards, pour couvrir toutes les dépenses liées à la riposte contre le
COVID-19.
Deuxièmement, le renforcement de la résilience sociale des
populations.
L’Etat prendra en charge les dépenses suivantes :
- 15,5 milliards, pour le paiement des factures d’électricité des
ménages abonnés de la tranche sociale, pour un bimestre ; soit
environ 975 522 ménages ; - 3 milliards, pour la prise en charge des factures d’eau de
670 000 ménages abonnés de la tranche sociale, pour un bimestre ; - 69 milliards, au lieu des 50 initialement prévus, pour l’achat de
vivres au bénéfice d’un million de ménages éligibles ; - 12,5 milliards, pour aider la diaspora.
Troisièmement, l’Etat sauvegardera la stabilité macroéconomique et
financière pour soutenir le secteur privé et maintenir les emplois à
travers un programme d’injection de liquidités assorti de mesures
fiscales et douanières.
Ainsi, 302 milliards seront consacrés au paiement dus aux
fournisseurs de l’Etat.
Les règles et priorités de paiement concourant à l’objectif de stabilité
économique seront publiées et connues de toutes les entreprises.
Ces dernières s’engageront à maintenir les salaires.
Une enveloppe de 100 milliards sera spécifiquement dédiée à l’appui
direct des secteurs de l’économie les plus durement touchés par la
crise, notamment les transports, l’hôtellerie mais également
l’agriculture.
De même, en rapport avec le secteur financier, l’Etat mettra en place
un mécanisme de financement à hauteur de 200 milliards, accessible
aux entreprises affectées, selon une procédure allégée.
L’Etat procèdera au remboursement des crédits de TVA dans des
délais raccourcis pour remettre de la trésorerie aux entreprises.
Des remises et suspensions d’impôts seront accordées aux
entreprises qui s’engageront à maintenir leurs travailleurs en activité
pour la durée de la crise, ou à payer plus de 70% du salaire des
employés mis en chômage technique pendant cette période.
Cette facilité de trésorerie concerne les retenues opérées sur les
salaires et les cotisations sociales que les entreprises du secteur privé
versent à la Caisse de sécurité sociale et à l’IPRES.
Pour la mise en œuvre de cette mesure, l’administration fixera, en
toute transparence, les règles concernant les engagements de l’Etat
et la responsabilité des entreprises.
Les Petites et Moyennes Entreprises dont le chiffre d’affaires est
inférieur ou égal à 100 millions de francs CFA, et les entreprises
évoluant dans les secteurs les plus impactés par la pandémie,
notamment le tourisme, la restauration, l’hôtellerie, le transport,
l’éducation, la culture et la presse, bénéficieront d’un différé de
paiement des impôts et taxes jusqu’au 15 juillet 2020.
Au titre du soutien à l’investissement, il y aura une prolongation du
délai général de paiement de la TVA suspendue recouvrée par la
douane et les services fiscaux de 12 à 24 mois ; ce qui représente un
report de paiement de 15 milliards sur l’année 2020. Il sera accordé
une remise partielle de la dette fiscale constatée au 31 décembre
2019, due par les entreprises et les particuliers, pour un montant
global de 200 milliards.
De même, l’Etat procèdera à la suspension du recouvrement de la
dette fiscale et douanière des entreprises les plus affectées par le
COVID-19.
En contrepartie, elles devront s’engager à maintenir les salaires de
leurs employés ou à payer plus de 70% du salaire des employés mis
en chômage technique. Les entreprises et personnes physiques qui
soutiennent le FORCE COVID-19 sous forme de dons versés au
compte ouvert au Trésor public, pourront déduire ces dons de leur
futur résultat fiscal.
J’ai également ordonné une réorganisation du budget par des coupes
sur les dépenses de fonctionnement et d’investissements reportés ;
ce qui correspond à une économie de 159 milliards de francs CFA.
En outre, le gouvernement sécurisera 178 milliards pour couvrir
partiellement des pertes de recettes budgétaires induites par la crise.
Quatrièmement enfin, le Programme de résilience économique et
sociale permettra d’assurer l’approvisionnement régulier du pays en
hydrocarbures, produits médicaux, pharmaceutiques, et denrées de
première nécessité.
Le gouvernement veillera particulièrement à lutter contre toute
pénurie artificielle et hausse indue des prix.
L’ensemble des dépenses liées à la mise en œuvre du Programme de
résilience économique et sociale seront couvertes par le Fonds de
Riposte contre les Effets du COVID-19, FORCE-COVID-19, doté de
mille milliards de FCFA, financé par l’Etat et des donations
volontaires.
Au nom de la Nation, je remercie celles et ceux qui ont déjà contribué
au FORCE-COVID-19 : secteur privé, personnes physiques et
partenaires au développement. J’invite toutes les bonnes volontés à
se joindre à cet élan de solidarité nationale.
Afin d’assurer les meilleures conditions d’inclusion et de
transparence, le FORCE-COVID-19 sera supervisé par un Comité de
pilotage qui comprendra des représentants de l’Etat, de l’Assemblée
nationale, toutes sensibilités confondues, et de la société civile.
Au demeurant, cette crise doit aussi nous faire réfléchir davantage
sur nos limites et nos vulnérabilités.
Nous avons fait de grands progrès dans la production agricole pour
assurer notre souveraineté alimentaire.
Mais nous devons encore produire plus, et mieux consommer
sénégalais pour être moins dépendants des marchés extérieurs. Je
tiens particulièrement à la mise en œuvre accélérée du Programme
d’autosuffisance en riz.
Mes chers compatriotes,
Dans un contexte global marqué par de nouvelles menaces
transfrontalières comme le COVID-19, la vulnérabilité de l’Etat-Nation
rend encore plus pertinent l’attachement de notre pays au
panafricanisme.
Parce que l’unité africaine est pour nous un impératif de premier
ordre, je poursuivrai sans relâche mes efforts à l’échelle sous
régionale et continentale pour un front commun de l’Afrique dans la
gouvernance mondiale et la prise en charge de l’impact du COVID-19.
Quand une crise frappe toutes les économies, les plus faibles sont
évidemment les plus affectées.
Je renouvelle par conséquent mon appel aux partenaires bilatéraux
et multilatéraux à appuyer nos efforts en annulant la dette publique
et en réaménageant la dette privée selon des mécanismes à
convenir.
Du reste, la tourmente qui secoue le monde a fini de révéler au grand
jour la fragilité de tous les pays et leurs vulnérabilités communes.
Alors, il est temps de repenser l’ordre des priorités.
Il est temps de travailler ensemble à l’avènement d’un nouvel ordre
mondial qui met l’humain et l’humanité au cœur des relations
internationales.
Ensemble, mes chers compatriotes, tenons bon. Ensemble, restons
debout et combatifs.
Ensemble, gardons le cap sur l’objectif d’émergence, par le culte du
travail, de la discipline et du civisme. Dans le temps long de la vie
d’une Nation, le 60e anniversaire de notre indépendance est moins
un aboutissement qu’une étape symbolique ; une halte pour
revigorer notre marche solidaire et résolue vers un futur meilleur.
Nous sommes à la fleur de l’âge qui ouvre l’âge de la belle saison.
Et l’histoire nous enseigne que c’est en subissant l’épreuve du feu
que le fer gagne en éclat.
Il en est de même de la Nation pour la sauvegarde de sa liberté.
La liberté est un combat de tous les jours.
Et c’est à l’épreuve de ce combat qu’un peuple teste ses capacités de
dominer l’adversité pour rester libre et réaliser son destin.
Unis et solidaires, j’ai foi en notre détermination à hisser nos
capacités à la hauteur de nos ambitions pour accomplir notre grand
dessein.
Vive le Sénégal en paix, toujours plus uni, plus libre et plus prospère !
Bonsoir et bonne fête de l’indépendance.