En plus d’être une crise sanitaire, la pandémie de la Covid 19 a durement affecté l’économie mondiale.
Tous les clignotants sont au rouge. Certes, l’Afrique résiste mieux à la maladie que les autres continents,
cependant, sur le plan économique, on ne peut dire de même. Face à des prévisions qui ne sont guère
rassurantes, les pays africains réfléchissent pourtant à l’après-Covid.
La pandémie de la Covid 19 a fini de
mettre à terre l’économie mondiale.
Toutes les prévisions dessinent des
lendemains difficiles pour tous les pays.
Continent pauvre aux économies fragiles,
l’Afrique risque d’en pâtir plus que les autres
continents même si, sur le plan sanitaire, elle
s’en sort mieux que les autres. Les écono-
mistes du Fmi ont d’ailleurs déjà tiré la son-
nette d’alarme. Ils anticipent la pire contrac-
tion jamais enregistrée de 1,6 % pour la région
de l’Afrique subsaharienne, soit une chute
de 5 % par rapport à l’an dernier. Une crise
qui se propage sous l’onde de trois chocs
conjugués : « perturbation de la production
et forte baisse de la demande ; retombées
du ralentissement brutal de la croissance
mondiale et du durcissement des conditions
financières ; et recul prononcé des cours des
produits de base », détaille le Fonds moné-
taire international (Fmi) dans son rapport sur
les Perspectives économiques mondiales pu-
bliées au mois de mai. « Cette baisse de la
production est la plus importante jamais en-
registré et aucun pays africain ne sera épargné
», a d’ailleurs souligné Abede Sellasie, Direc-
teur du département Afrique du Fmi.
APRES-COVID-19
Afrique, le temps des plans
de relance économique
❒ Par Demba DIOUM
En plus d’être une crise sanitaire, la pandémie de la Covid 19 a durement affecté l’économie mondiale.
Tous les clignotants sont au rouge. Certes, l’Afrique résiste mieux à la maladie que les autres continents,
cependant, sur le plan économique, on ne peut dire de même. Face à des prévisions qui ne sont guère
rassurantes, les pays africains réfléchissent pourtant à l’après-Covid.
38 LE DEFI PANAFRICAIN • BIMESTRIEL D’INFORMATIONS • JUILLET 2020
International
Selon le Fmi, l’impact du choc sanitaire et
des mesures prises pour limiter la propaga-
tion du virus se répercutent directement et
sévèrement sur les économies nationales.
Ainsi, outre les coûts humains croissants, la
fermeture des lieux de travail, la perturbation
des filières d’approvisionnement et la dimi-
nution de la main-d’œuvre due à la maladie
ou aux décès peuvent profondément pertur-
ber la production, ajoute le Fmi. En plus de
ces chocs internes, l’Afrique subsaharienne
devrait affronter de « graves chocs externes
», prévient l’institution de Bretton Woods. En
effet, selon le Fmi, un brutal ralentissement
de la croissance des principaux partenaires
commerciaux se traduira par une baisse des
exportations africaines tandis que les pertur-
bations des filières d’approvisionnement ré-
duisent la disponibilité des produits importés,
ce qui pourrait engendrer des pressions in-
flationnistes.
MESURES D’URGENCE
Il va s’en dire que la crise économique exa-
cerbera les conditions sociales et aggravera
les vulnérabilités économiques existantes.
Face à cette situation, des mesures urgentes
et immédiates sont requises pour limiter les
dégâts économiques. C’est ce qui explique
les plans de riposte mise en place un peu
partout sur le continent. Ces initiatives visent
uniquement à faire face à l’urgence. Mais pour
l’après-Covid, il faudra d’autres initiatives
pour faire redémarrer la machine grippée par
la Covid 19. En effet, dans beaucoup de pays
africain, on commence déjà à réfléchir à un
plan de relance économique post-Covid
même si, l’heure actuelle, il n’y a aucune ga-
rantie quant à la fin de cette crise.
Par exemple, au Sénégal, cette initiative est
portée par le Ministère de l’Economie, du
Plan et de la Coopération. Depuis deux mois,
les services d’Amadou Hott travaillent d’ar-
rache-pied pour présenter au président Macky
Sall et au peuple sénégalais un document
de relance de l’économie nationale. Celui-ci
intitulé « Programme de relance de l’écono-
mie nationale (Pren) » est, en réalité, une
continuité du Programme de Résilience éco-
nomique et social (Pres) et vise une relance
immédiate de l’économie nationale, couvrant
la période 2020-2021, en s’articulant sur deux
piliers essentiels : le soutien à l’investissement
et le soutien à la consommation. Ce, en ci-
blant des secteurs comme le tourisme, Pêche,
l’industrie pharmaceutique, le numérique,
l’agro- industrie, l’agriculture, les Btp. Les au-
tres pays de la sous-région notamment la
Côte d’Ivoire se sont inscrits dans le même
sillage de la conception de plans de relance
économique.
SE LIBÉRER DE LA DÉPENDANCE
DES COURS DES MATIÈRES PREMIÈRES
Déjà, le Fmi donne quelques pistes. Après la
relance budgétaire, l’institution préconise la
relance monétaire, demandant aux banques
centrales de baisser leur taux d’intérêt et d’in-
jecter des liquidités pour permettre aux
banques et aux établissements financiers de
prêter aux Pme. Pour Papa Demba Thiam,
consultant et entrepreneur international pour
le développement des chaînes de valeurs,
ancien cadre de la Banque mondiale qui a
travaillé, entre autres, sur d’importants projets
en liaison avec la Commission européenne
et l’Organisation des Nations unies pour le
développement industriel (Onudi), malgré
sa fragilité sanitaire, économique et même
politique à certains égards, l’Afrique peut se
remettre à l’endroit si elle tire les meilleures
leçons de ce cataclysme planétaire qu’est la
pandémie du Covid-19.
Jean-Fidèle Otandault, expert-comptable,
ancien ministre gabonais du Budget et des
Comptes publics, ancien ministre de la Pro-
motion des investissements, n’en pense pas
moins. Dans une tribune publiée dans le jour-
nal panafricain Jeune Afrique, il invite les
pays africains à se libérer de la dépendance
des cours des matières premières qu’il
s’agisse d’hydrocarbures ou de produits mi-
niers. « Pour se relever, les pays du continent
devront miser sans compter sur des secteurs
porteurs et mettre eux-mêmes un terme à
cette stratégie mondiale qui permet un tel
marchandage des précieuses ressources, au
détriment de l’immense majorité des popu-
lations. En misant sur la transformation des
produits bruts et sur des secteurs à forte va-
leur ajoutée, pêche, agriculture, bois, nou-
velles technologies et numérique, les pays
africains ont une chance de s’en sortir », sou-
tient-il. Cependant, l’ancien ministre gabonais
prévient que les pays africains ne pourront
pas s’en sortir seuls. Le gel immédiat du rem-
boursement des intérêts de la dette des pays
africains pour l’exercice 2020 est une bonne
chose à ses yeux. Cette mesure pourrait avoir
le mérite de dégager des marges budgétaires
conséquentes susceptibles de financer im-
médiatement la réponse à la pandémie. Pour-
suivi sur cinq ans, ce mécanisme sera une
bouffée d’oxygène bienvenue, si tant est qu’il
soit conditionné par des mesures nationales
adéquates.
« Ainsi, chaque État doit s’engager à inscrire
dans son budget les fonds ainsi dégagés pour
l’investissement dans les secteurs de la santé,
de l’éducation, de l’eau, de l’énergie et de
l’agriculture. Et ce, pour assurer une certaine
stabilité du tissu économique et la pérennité
des politiques publiques en direction du bien-
être des populations », préconise Jean-Fidèle
Otandault.
Depuis deux mois, les services d’Amadou Hott travaillent d’arrache-pied pour
présenter au président Macky Sall et au peuple sénégalais un document de relance
de l’économie nationale. Celui-ci intitulé « Programme de relance de l’économie
nationale (Pren) » est, en réalité, une continuité du Programme de Résilience
économique et social (Pres) et vise une relance immédiate de l’économie nationale,
couvrant la période 2020-2021, en s’articulant sur deux piliers essentiels : le soutien
à l’investissement et le soutien à la consommation.