En net recul depuis une vingtaine d’années, la pauvreté dans le monde a connu une
brusque hausse depuis 2020 à cause la Covid-19 accentuée par la guerre en Ukraine.
Une situation préoccupante qui a poussé 238 organisations à interpeller, dans une
lettre ouverte, les dirigeants internationaux sur la nécessité de réagir.
D’après ces associations, 50 millions de personnes sont au bord
de la famine. Et d’ajouter : « il ne s’agit pas d’un pays ou d’un
continent, et la faim n’a jamais une seule cause. Il s’agit de
l’injustice de l’humanité tout entière ».
C’est un chiffre qui fait froid dans le
dos : une personne meurt de la faim
toutes les quatre secondes dans le
monde. L’estimation est de 238 Organisations
non gouvernementales dans une lettre ou-
verte publiée le 20 septembre passé à la veille
de l’ouverture de la 77ème Session de l’As-
semblée générale des Nations Unies. Le ti-
ming de la publication de cette missive est
bien calculé : pousser les dirigeants mondiaux
réunis à New York à agir pour stopper la crise
mondiale de la faim. Car, loin d’être éradiqué,
le fléau de la sous-nutrition s’aggrave dans
le monde, ont dénoncé ces organisations.
« Les organisations venant de 75 pays ont
signé une lettre ouverte pour exprimer leur
indignation face à l’explosion du nombre de
personnes souffrant de la faim et pour faire
des recommandations, alors que 345 millions
de personnes dans le monde souffrent de
faim aiguë, un nombre qui a plus que doublé
depuis 2019 », soulignent ces 238 organisa-
tions dans un communiqué. Déjà, au mois
de juillet dernier, l’Organisation des Nations
unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)
signalait que le monde s’éloigne de son ob-
jectifd’éliminer la faim, l’insécurité alimentaire
et la malnutrition sous toutes ses formes d’ici
2030.
Il y a près de 20 ans, en 2006, l’association
Action contre la Faim affirmait déjà qu’une
personne mourrait de la faim toutes les quatre
secondes dans le monde.
«Il est inadmissible qu’aujourd’hui, nous par-
lions encore de la famine au XXIe siècle »
De la Somalie à Haïti, du Sud-Soudan au
Yémen, de l’Afghanistan au Nigeria, les vies
des personnes vivant dans les contextes les
plus fragiles sont dévastées par une crise ali-
mentaire mondiale, favorisée par un mélange
mortel de conflits, de changement climatique,
de hausse des coûts et de crises écono-
miques, exacerbée par le Covid-19 etle conflit
en Ukraine, déplorent les associations
dans leur lettre ouverte. Selon elles, il est
inadmissible qu’avec toute la technologie
agricole (…) aujourd’hui, nous parlions encore
de la famine au XXIe siècle. D’après ces asso-
ciations, 50 millions de personnes sont au
bord de la famine. Et d’ajouter : « il ne s’agit
pas d’un pays ou d’un continent, et la faim
n’a jamais une seule cause. Il s’agit de l’in-
justice de l’humanité tout entière ».
Les signataires de la lettre ouverte ont détaillé
leur méthode de calcul dans une note de bas
de page. Ils s’appuient sur les chiffres du der-
nier rapport en septembre du Réseau mondial
sur les crises alimentaires, créé en 2016 par
la FAO, le Programme alimentaire mondial
(PAM), l’Union européenne et des ONG.
À CAUSE DU CONFLIT RUSSO-UKRAINIEN 70 millions de personnes sont tombées dans la pauvreté depuis mars 2022
La flambée des prix de certaines denrées alimentaires occasionnée par le conflit entre l’Ukraine et la
Russie a fait plonger plus de 70 millions de personnes dans la pauvreté en trois mois, selon l’Onu.
Alors qu’on pensait que le monde allait
retrouver une certaine stabilité après
la terrible épreuve que lui a imposée
la crise sanitaire de Covid 19, voilà que, sur
le plan socioéconomique, il affiche un visage
bien exsangue. La cause au conflit russo-
ukrainien qui a occasionné la flambée des
prix de l’alimentation et de l’énergie. Ce qui
a eu une répercussion immédiate sur la vie
de millions de personnes à travers le monde.
En effet, selon un rapport du Programme des
Nations unies pour le développement (Pnud)
publié le jeudi 7 juillet passé, le conflit en
Ukraine a fait plonger dans la pauvreté depuis
mars et en seulement trois mois 71 millions
de personnes vivant dans des pays à revenus
faibles. Cette accélération de la pauvreté « est
considérablement plus rapide que le choc
de la pandémie de Covid-19 », note le Pnud
dans un communiqué, qui impute en partie
à la guerre en Ukraine la flambée des prix.
LE RISQUE D’UNE « FAMINE À
UNE VITESSE ÉPOUSTOUFLANTE »
Selon le Programme onusien, «les transferts
d’argent ciblés vers les ménages sont plus
équitables et plus rentables que des subven-
tions énergétiques générales ». Le Pnud consi-
dère dans le même temps que les pays
concernés auront besoin d’un soutien du sys-
tème multilatéral « pour joindre les deux
bouts ». « Alors que les taux d’intérêt aug-
mentent en réponse à la flambée de l’infla-
tion, il existe un risque de déclencher une
nouvelle pauvreté induite par la récession
qui exacerbera encore plus la crise, accélérant
et approfondissant la pauvreté dans le
monde », avertit aussi le Pnud dans son rap-
port.
Le document s’est penché sur 159 pays. Les
Etats en situation la plus critique sont dans
les Balkans, dans la région de la mer Cas-
pienne et en Afrique subsaharienne, en par-
ticulier au Sahel. « Des flambées de prix sans
précédent signifient que pour de nombreuses
personnes à travers le monde, la nourriture
qu’elles pouvaient se permettre hier n’est
plus accessible aujourd’hui », déplore dans
le communiqué le patron du Pnud, Achim
Steiner. « Cette crise du coût de la vie fait bas-
culer des millions de personnes dans la pau-
vreté » au risque d’une «famine à une vitesse
époustouflante ». En parallèle, « la menace
d’une augmentation des troubles sociaux
grandit de jour en jour », estime-t-il. Parmi
les pays faisant face aux conséquences les
plus dramatiques de la hausse des prix figu-
rent l’Arménie, l’Ouzbékistan, le Burkina Faso,
le Ghana, le Kenya, le Rwanda, le Soudan,
Haïti, le Pakistan, le Sri Lanka, l’Ethiopie, le
Mali, le Nigeria, le Sierra Leone, la Tanzanie
ou le Yémen.
La pauvreté en faits et en chiffres
• En 2015, 734 millions de personnes vivaient en-dessous du seuil
international de pauvreté fixé à 1,90 dollar par jour.
• La plupart des personnes vivant en-dessous du seuil de pauvreté
sont réparties entre deux régions : l’Asie du Sud et l’Afrique sub-
saharienne.
• En raison de la pandémie, l’extrême pauvreté devrait augmenter
de façon significative en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne
avec respectivement 32 millions et 26 millions de personnes
supplémentaires vivant sous le seuil de pauvreté.
• La proportion de travailleurs vivant dans l’extrême pauvreté dans
le monde a diminué de moitié au cours de la dernière décennie
passant de 14,3 % en 2010 à 7,1 % en 2019.
• Avant même l’apparition de la COVID-19, les estimations suggé-
raient que 6 pour cent de la population mondiale vivrait encore
dans l’extrême pauvreté en 2030, manquant ainsi l’objectif de
mettre fin à la pauvreté. Les retombées de la pandémie menacent
de faire basculer plus de 70 millions de personnes dans l’extrême
pauvreté.
• Un enfant sur cinq vit dans l’extrême pauvreté sachant que la
pauvreté et les privations durant les premières années de vie peu-
vent avoir des conséquences négatives irréversibles.
• En 2016, 55 pour cent de la population mondiale – soit 4 milliards
de personnes – ne bénéficiait d’aucune protection sociale.
Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté
Par sa résolution 47/196 adoptée le 22 décembre 1992, l’Assemblée
générale a déclaré le 17 octobre Journée internationale pour
l’élimination de la pauvreté. La première célébration de la Journée
internationale pour l’élimination de la pauvreté date du 17 octobre
- Ce jour-là, plus de 100 000 personnes se sont rassemblées
au Trocadéro, à Paris, où la Déclaration universelle des droits de
l’homme a été signée en 1948, afin d’honorer les victimes d’extrême
pauvreté, de violence ou de faim. Leurs convictions, la pauvreté
est une violation des droits de l’homme et il est nécessaire de
s’unir pour faire respecter ces droits, sont inscrites sur une dalle
commémorative inaugurée ce jour-là.
Depuis, des personnes de tous horizons, toutes croyances ou ori-
gines sociales se réunissent chaque année le 17 octobre afin de
renouveler leur engagement et de manifester leur solidarité aux
plus démunis.